Le trouble borderline ou trouble l'état limite
Cet article a été écrit à l'aide du livre « Manuel du borderline » par Martin Desseilles, Bernadette Grosjean et Nader Perroud. J'y aborde les symptômes du trouble borderline en essayant de le faire clairement pour mieux comprendre comment les personnes atteintes le vivent ou si tu as besoin de mettre un mot sur ce que tu ressens. Cet article est à but informatif, si tu veux plus de renseignements, de conseils je t'invite à lire le livre cité plus haut qui en parle plus en profondeur. Dans ce livre se trouve aussi des méthodes pour se soigner que j'aborderais peut-être dans un autre article.
J'y expose aussi mon propre vécu de personne borderline en dernier chapitre et les solutions que je trouve et que j'ai trouvé pour pallier les crises hautes et basses (plus de précisions au chapitre 11)
- C'est quoi ?
- J'ai peur de l'abandon
- J'ai des problèmes relationnels
- Je ne sais pas qui je suis
- Je me mets en danger
- J'ai besoin de me faire du mal
- J'ai des changements d'humeurs
- Je me sens vide
- J'explose
- Je suis parano
- Mon vécu en tant que personne borderline
- C'est quoi ?
Le trouble borderline, ou trouble de l'état limite est un trouble qui joue sur les relations interpersonnelles (« Qualifie les relations, les liens existants entre plusieurs personnes » - Linternaute) ainsi que l'humeur et la vision de soi-même.
Selon Ott Kernberg, le trouble borderline comporte ces principales caractéristiques :
- Une difficulté à avoir une bonne image de soi-même et des personnes importantes de sa vie (selon lui, appelé « syndrome d'identité diffuse »).
- Des recours à des mécanismes peu structurés, voire primitifs : Voir noir ou blanc. Il n'y a pas d'entre deux, la personne borderline voit les choses soient bonnes soient mauvaises, ainsi que refuser de reconnaitre quelque chose de vraie comme vraie.
- Les personnes borderline différencient ce qui est réel ou non sauf pendant des crises intenses (dû au stress) qui peuvent l'amener à voir une réalité déformée, voire se dissocier (sentiment de se séparer de son corps).
- J'ai peur de l'abandon
Dans le trouble borderline on retrouve une intense peur de l'abandon. Elle est caractérisée par des efforts pour éviter un abandon réel ou bien imaginaire, avoir besoin sans arrêt d'être rassuré.e. Elle représente un poids pour la personne borderline car les relations avec ses proches peuvent devenir tendue, voire mener à un arrêt total de la relation (amicale, familiale ou amoureuse).
- J'ai des problèmes relationnels
Ce chapitre est en lien avec le précédent car l'abandon fait partie des problèmes relationnels. Ainsi la dérégulation émotionnelle et interpersonnelle contient plusieurs critères :
- Les efforts pour éviter l'abandon.
- Des schémas de relations intenses et instables (un jour tu vas aimer la personne d'un amour fou puis un autre jour tu vas être totalement dégouté.e sans raison valable).
- Un problème d'identité. Tu vas avoir besoin du regard de l'autre pour te sentir vivre.
- Une impulsivité et des prises de risque. Tu te mets rapidement et intensément en colère d'une seconde à l'autre, jusqu'à en perdre la raison et donc prendre des risques.
- Une récurrence de comportement suicidaires, d'automutilation et des gestes ou menace. Dans ce chapitre ça correspond à « du chantage affectif » ou bien suite à une interaction, tu te déteste et donc t'en prends à toi.
- Une instabilité affective et une insécurité dans la relation.
- Un sentiment de vide et de tristesse.
- Des colères inappropriées et intenses ainsi que des émotions négatives et de l'anxiété. Des émotions très vives et intenses liées aux relations interpersonnelles.
- Des épisodes paranoïaques transitoires en relation avec le stress, tu vas ainsi croire que le monde te haïs, voire te veux du mal, sans raison particulière. Le stress pouvant mener à des symptômes dissociatifs.
Ainsi, les relations interpersonnelles sont très intenses et instables, une personne borderline peut aimer ou détester quelqu'un d'un jour à l'autre sans raison, ce qui peut provoquer des ruptures et l'incompréhension de l'autre. Le manque de confiance joue aussi un rôle important dans les relations car on se sent vivre au travers de l'autre et non pas pour soi-même, elle peut mener à une régression lors d'une crise où on se met à réagir comme un enfant en cas de stress.
- Je ne sais pas qui je suis
Les personnes borderline sont souvent liées au manque d'identité, iels ne savent pas qui iels sont et qu'elles sont leur identité. Ne pas savoir ce qu'on veut, ni ce qu'on ne veut pas, ce qu'on aime ou n'aime pas. Iels vivent au travers de l'autre et n'ont donc pas une image de soi réelle, iels souhaitent souvent ne plus exister sans pour autant être suicidaires.
Le sentiment conscient d'avoir une identité personnelle est basée sur trois observations simultanées :
- La perception de l'unité de soi : qui je suis maintenant
- Avoir une image stable dans le temps et l'espace : même si certaines choses en moi changent, je demeure globalement la même personne
- Mon entourage reconnaît cette identité relativement stable au fil du temps
Les personnes borderline ont besoin de l'autre pour se sentir exister et reconnues. L'identité se construit avec le temps, il faut accepter qui l'ont est et que cette image soit stable et que le regard de l'autre devienne moindre. Elles souvent se créer une identité fausse, faire « comme si », c'est-à-dire qu'elles ont des relations artificielles où elles ne sont pas naturelles mais se conforment aux autres pour être aimées. Par exemple, avec mon vécu, je me suis créé un « faux moi », au collège je me mêlais aux goûts des autres que ce soit dans le style vestimentaire (durant mon harcèlement) ou aux passions de mes amies, voir à reprendre des tics de langages et mon rire. Je me suis toujours dis que j'étais comme un papier calque où je reprenais chaque chose qui pouvait m'inclure dans un groupe.
- Je me mets en danger
Dans ce chapitre nous allons essentiellement parler des drogues : l'alcool, cannabis, LSD etc. La drogue peut être un moyen de s'évader et d'être plus sociable. Malgré ça, il devient une dépendance qui met en danger les personnes borderline en devenant une addiction. Plus le nombre de substances deviennent régulières, plus on cherche à en prendre plus pour ressentir les effets car le corps s'y est habitué. Certaines personnes en prennent pour diminuer l'angoisse jusqu'à en devenir dépendantes. On sait tous les ravages de l'alcoolisme sur le foie et le corps en général, mais les personnes borderline sont plus sujettes à prendre des drogues car comme je l'ai dit elles ont besoin de ne plus ressentir de l'angoisse, du vide, ou de la tristesse. Or, souvent c'est l'effet inverse qui se produit, après une prise de drogues elles peuvent se sentir tout aussi tristes et angoissées, menant à l'automutilation ou autre fait dangereux.
Selon le « Manuel diagnostique et statistiques des troubles mentaux » (Association américaine de psychiatrie), il décrit la dépendance ou l'addiction comme un mode d'utilisation inapproprié d'un produit entrainant de signes physiques et psychiques. Elle comprend entre autres :
- Une incapacité à gérer sa consommation : la personne consomme plus que ce qu'elle voulait.
- Un temps important dans la recherche du produit : les activités sociales, culturelle ou de loisir sont ainsi abandonnées au profit de la recherche de la substance.
- Une poursuite de la consommation malgré la conscience des problèmes qu'elle engendre.
- Deux symptômes clés rendent très souvent compte de la dépendance :
- La tolérance, ou accoutumance, qui se traduit par l'augmentation des doses pour obtenir un effet similaire.
- Le syndrome de sevrage, qui se traduit par l'augmentation de l'anxiété, de la nervosité et des malaises physiques à l'arrête de la substance.
Ainsi, la prise de drogues régulières renforce la tolérance du corps et pousse donc à prendre plus de substances.
- J'ai besoin de me faire du mal
La manière de se faire du mal revient souvent pour les personnes borderline : les scarifications. Elles permettent de se faire du mal pour par exemple se punir d'exister et d'avoir ce corps qu'on ne connaît pas et qu'on déteste, mais aussi pour attirer l'attention de ses proches pour leur montrer que ça ne va pas et qu'on a besoin d'aide. Mais se faire du mal ce n'est pas que les scarifications, c'est aussi se brûler, se griffer ou gratter jusqu'au sang, frapper contre les murs, se faire vomir, avaler des objets dangereux, s'arracher les cheveux et/ou les sourcils etc.
Les personnes borderline ont aussi des tendances à avoir de comportements impulsifs autodestructeurs comme :
- La boulimie.
- La sexualité à gros risque.
- Des dépenses incontrôlées.
- Abus d'alcool ou de drogues.
- Conduite dangereuse.
- Abus de médicaments.
Cependant, les personnes borderline peuvent faire des menaces suicidaires sans réellement vouloir se donner la mort. C'est la peur de l'abandon qui prend le dessus. Ceci-dit, les menaces deviennent dangereuses pour l'autre, car elle fait culpabiliser et rend la relation toxique et dangereuse. Je ne cautionne donc pas ces gestes mais informe.
- J'ai des changements d'humeurs
Les personnes borderline, ont des changements d'humeurs très aléatoires et intense. Comparer aux personnes non-borderline qui ont des hauts et des bas, une personne borderline passe d'une émotion a une autre très rapidement et à l'extrême. Personnellement, je les appelle « crise haute » et « crise basse ». Les crises hautes sont un sentiment extrême de joie, qui ressemblent aux périodes des personnes bipolaires de maniaque. Je parle vite, je bouge tout le temps, je me tape, je me sens invincible. Mais quand je m'en rends compte je pars en crise d'angoisse car cette crise me fait peur. Les crises basses se rapproche de la dépression sur une courte durée, elles peuvent durer 1h comme une journée (pour moi), je ne fais rien, je n'ai aucun plaisir à faire des activités, je ne prends pas soin de moi. Cependant contrairement à une dépression elles sont courtes. Voici un graphique qui représente mes émotions sur une semaine et en comparaison celles d'une personne dépressive (je n'en ai pas trouvé pour les personnes bipolaires):

Graphique de Chrys, en dépression

Mon graphique, trouble borderline
- Je me sens vide
Le sentiment de vide est très récurrent, on ne sait pas qui on est, ce qu'on aime ou non, s'imaginer un avenir et peut mener à une prise de drogue pour se sentir vivre, voire aller jusqu'à des idées et gestes dangereux et/ou suicidaires. L'ennui est présent aussi, les personnes borderline peuvent ne pas ressentir de plaisir ou d'envie pour réaliser des activités, ce qui ne comble pas ce sentiment de vide.
- J'explose
L'impulsivité se définit par quatre principaux aspects : l'absence de préméditation, l'urgence, la recherche de sensations fortes et le manque de persévérance.
Les personnes borderline impulsives ne réfléchisse pas avant d'agir, pouvant venir à des gestes dangereux comme la scarification ou plus soft comme planifier des rendez-vous sans savoir si on peut être présent.e. Il y aussi des achats compulsifs, acheter sans savoir si on a les moyens.
Critères pour démasquer les impulsifs :
- Dépenses inconsidérées
- Prises de risques inconsidérées sur la route
- Consommation d'aliments de manière immodéré
- Entretien d'une forme de proximité sexuelle
- Menaces répétées à l'encontre des autres
- Cris répétés à l'encontre d'autrui
- Menace de blesser autrui et bagarre
- Destruction de biens, vols et délinquance
Le trouble du déficit de l'attention-hyperactivité peuvent avoir ce trouble en plus de celui borderline.
- Je suis parano
Sous la direction de John Gunderson, Marie Zanarini et son équipe de l'hôpital McLean, affilié à la faculté de l'université d'Harvard ont pendant 16 ans suivis 250 patients souffrants du trouble borderline et une étude récente montre ces chiffres :
- 87% des patients borderline expriment des pensées paranoïaques non délirantes ;
- 76% présentent des perceptions inhabituelles : sentiment de dépersonnalisation, de déréalisation, impression d'entendre des voix, etc. ;
- 86% ont des formes de pensées bizarres : pensées magiques, idées exagérées (par exemple sentiment d'être mauvais, trop gros, laid, stupide)
Contrairement à la schizophrénie, une personne borderline peut, jusqu'à un certain point, reconnaître qu'il s'agit de perceptions inhabituelles mais pas nécessairement « réelles ». Ces épisodes sont souvent dus à des expériences traumatisantes, mais aussi sont provoquées par des évènements qui touchent la peur de l'abandon et les relations interpersonnelles comme par exemple quand l'autre regarde sa montre une personne borderline va le prendre comme un rejet, une peur qu'en fait cette personne veut partir et nous abandonner.
Mais avec le temps ces épisodes paranoïa diminuent.
Les personnalités paranoïaques :
- Une surestimation de leurs qualités, un orgueil très développé, de l'arrogance.
- Une méfiance extrême à l'égard des autres
- Une susceptibilité excessive
- Une absence d'autocritique, une fausseté du jugement associée à une grande difficulté à remettre en cause leur jugements ou leurs raisonnements
- Un comportement passif-agressive
Contrairement aux personnes borderline, qui elles sont convaincues que les personnes autour d'elles veulent l'abandonnées, une personne paranoïaque va se dire que ces personnes ne la méritent pas et que c'est inadmissible.
- Mon vécu en tant que personne borderline
J'ai été diagnostiquée borderline léger en juin 2020, mais ce trouble remonte à mon enfance du collège et lycée jusqu'à aujourd'hui. J'ai vécu du harcèlement au collège, ainsi qu'une grosse dépression début 2017. Le diagnostic a été donc long pour être posé. En début 2017, je me suis renseignée sur le trouble borderline parce que je n'arrivais pas à mettre de mot sur ce que je vivais, j'ai vécu beaucoup d'abandons à cette période, menant à des gestes de scarifications et pensées suicidaires. Après en avoir parlé à une psychologue, elle m'a d'abord dit que ce n'étais pas ça. Au fur et mesure du temps, en 2018 mon état s'est empiré jusqu'à me dire qu'il fallait absolument voir une psychologue. Cette même psychologue m'a diagnostiquée une dépression sévère. J'ai, pendant 3 mois jonglé entre la voir et voir mon médecin traitant pour avoir des anti-dépresseurs. En début 2019, j'ai décidé de voir un psychiatre, je lui ai parlé de ce trouble borderline sans trop qu'on y mette de l'importance. En juin 2020, on en a reparlé, j'ai fait des tests, et il m'a annoncé que j'étais bien borderline.
Au début de ma dépression, en 2017, j'ai vécu des épisodes paranoïaques très récurrents. Je pensais que tout.e.s mes ami.e.s me détestaient, qu'iels allaient partir et me laisser tomber. Ces épisodes étaient de plus en plus récurrents et forts, je me suis mise à croire que le monde voulait me tuer, il m'était impossible ne serait-ce que chercher du pain car à chaque fois que je voyais quelqu'un ou une voiture ralentir, j'allais me faire tuer.
J'ai toujours eu des relations interpersonnelles compliquées depuis mon enfance, des disputes avec des amies menant à un abandon. Durant mon collège je me suis retrouvée seule en 4e et abandonnée par mes amies. J'ai toujours été une personne qui s'accrochait aux autres car la solitude me faisait peur. Je me considérais comme un « calque » car j'apprenais à me mettre dans des cases sur ma façon d'agir, comment je m'habillais etc. Je ne savais pas ce que j'aimais ou non.
Depuis 2016, j'ai découvert la scarification, par peur d'être abandonné j'ai utilisé ce prétexte pour ne pas me faire quitter par mon copain. Après notre rupture en 2017, j'ai commencé à me mettre en danger en prenant de la drogue régulièrement, me scarifiant dès que possible. Cette deuxième addiction est encore présente aujourd'hui mais beaucoup plus espacée.
Depuis peu, j'ai installé une application pour noter mes humeurs de la journée, et le résultat est concluant : je passe d'une émotion extrême à l'autre dans une journée. En août 2020, j'ai vécu une rupture compliquée ce qui a aggravé les perturbations de l'humeur. Aujourd'hui (novembre 2020) mes crises hautes et basses sont très intenses et aléatoires. Elles ressemblent à des phases maniaques et dépressives des personnes bipolaire. Un jour il me sera impossible de bouger de mon lit, et le lendemain je vais faire une crise maniaque en étant remplie d'émotions positives à l'extrême. Un exemple qui m'est arrivée il n'y a pas longtemps était une crise maniaque. Je me sentais invincible et intouchable, j'ai envoyé un message à un ancien harceleur en l'insultant, ensuite j'ai compris que mon état n'était pas normal alors je suis allée voir des infirmières pour me calmer (je suis en clinique), je bougeais dans tous les sens, parlais fort, ne ressentais plus les douleurs de mes plantes de pieds, et ça a duré une heure. A la fin de cette crise, j'ai eu des courbatures sur tout le corps et une extrême fatigue.
Etant borderline léger je ne présente pas tous les symptômes comme l'impulsivité. Je suis de nature calme et réfléchie, et suis très rarement impulsive car j'ai besoin d'organisation.
Mon séjour en clinique m'a appris que mes changements d'humeurs étaient très extrêmes mais gérables. J'ai redécouvert des thérapies que j'avais perdu pour pallier les scarifications et aux flash/ envies suicidaires, comme le dessin et l'écriture d'articles sur des sujets que j'aime. Apprendre à se comprendre est une thérapie aussi, on peut essayer beaucoup de méthodes différentes afin de se calmer ou exprimer ce que l'on ressent. Pour l'instant je n'ai très peu de conseils pour aider à soigner ce trouble car moi-même je suis encore novice là-dessus. Mais si tu souhaites avoir des exemples de solutions je t'invite à lire le livre que j'ai cité en introduction.
J'espère t'avoir aidé à te comprendre, ou bien à te renseigner sur ce trouble. Merci d'avoir lu cet article qui est le plus gros que j'ai fait jusqu'ici. Je te souhaite bon courage et beaucoup de bonheur.